En dehors des présentations type mathématique de la Mécanique Quantique qui font directement appel à des postulats, la plus part du temps elle est présentée suivant le schéma de Dirac (1) c'est à dire en prenant comme hypothèse fondamentale le principe de superposition. Beaucoup plus rarement, elle peut être présentée d'une manière dérivée des matrices de Heisenberg (2) en prenant comme hypothèse de base l'existence d'opérateurs hermitiques.

Dans les 2 derniers cas, on est amené à définir quelle est la signification des coefficients apparaissant lors des développements sur les bases propres des vecteurs d'états définis en général dans un espace de Hilbert. L'hypothèse de Born est alors prise en compte et définit le carré complexe de ces coefficients comme la probabilité du système physique d'être observé dans un des états propres. C'est à dire que lors d'une mesure faite sur un système physique on trouvera une des valeurs propres relative à un des états propres avec la probabilité associée. De plus, l'évolution du vecteur définissant l'état du système physique est engendrée par l'équation de Schrödinger. Équation qui sous forme d'opérateurs est aussi valable dans le cas relativiste en introduisant la notion de spineurs.

Avec ces 2 types de présentation, il est toujours tentant de vouloir donner une interprétation au vecteur d'état appelé couramment fonction d'onde. Et sauf si on lui donne une interprétation type De Broglie/Bohm (3), qui conduit d'ailleurs au final à des impasses, on se retrouve avec beaucoup d'interrogations.

Toutefois, il est possible de construire une théorie probabilistes des systèmes physiques qui redonnent la mécanique quantique en prenant comme hypothèse de base que ses probabilités sont issues d'une fonction complexe qui pourra se généraliser par la suite sous forme spinorielle. En fait ceci est tout simplement une inversion de la démarche habituelle qui a l'avantage de supprimer en grande partie les interrogations.

On considère donc qu'un événement, au sens large du terme, concernant un système physique se produit de façon probabiliste, par exemple la valeur d'une mesure a une certaine probabilité d'être trouvée. La façon la plus simple de relier cette probabilité à la fonction complexe dont elle est issue est de considérer que la probabilité est égale au carré complexe de la fonction complexe sous-jacente. Cette formule vérifie la condition de fermeture ainsi que l'indépendance des fonctions complexes quand on a des événements qui ne peuvent se produire simultanément, c'est à dire que si l'un se produit les autres ne peuvent pas se réaliser. L'évolution des probabilités de ces événements sont subordonnées à l'évolution des fonctions complexes. L'équation d'évolution sous forme d'opérateur devant respecter le principe de fermeture on trouve que l'opérateur d'évolution est composé d'un opérateur hermitique multiplié par l'unité des nombres complexes, i. On retrouve donc à une constante réelle près l'équation de Schrödinger. Le théorème de Noether montre que l'opérateur hermitique d'évolution peut être assimilé à l'hamiltonien du système et que l'on peut le décomposer en un opérateur hermitique lié à l''impulsion et un opérateur hermitique de type potentiel. De plus, du même théorème on peut déduire la forme de l'opérateur hermitique décrivant le moment cinétique. L'algèbre de l'opérateur moment cinétique montre qu'il a comme valeurs propres les nombres entiers mais aussi les nombres demi-entiers. En appliquant l'invariance de Lorentz à notre théorie, la notion de spineurs apparaît et justifie les valeurs propres demi-entières du moment cinétique généralisé qui se compose d'un spin et d'un moment cinétique purement spatial. Il reste alors à considérer le résultat de Planck pour mettre en relation nos constantes réelles avec la constante de Planck.

L'avantage principal de cette approche est que la fonction d'onde n'est qu'un intermédiaire de calcul. Lors d'une mesure on obtient une seule valeur réelle à laquelle est rattachée une certaine probabilité et les propriétés rattachées à un système physique sont automatiquement contextuelles. Comme toute théorie probabiliste elle est non locale et le fait d'avoir des systèmes physiques intriqués n'est pas un problème si l'on ne peut pas utiliser l'intrication pour échanger des informations sans faire intervenir obligatoirement en parallèle un système d'échange respectant les principes relativistes. A partir de cette théorie, il est facile d'expliquer l'ensemble des expériences faisant appel à la mécanique quantique, un exemple simple étant l'expérience des fentes d'Young. Il faut toujours garder à l'esprit que lors de la description d'une expérience on utilise des histoires qui gomment la myriade d'interactions que subit le système physique considéré. Par exemple dire qu'un photon est réfléchi par un miroir ne correspond pas du tout à la description de la vraie situation physique qui doit prendre en compte l'ensemble des interactions photon/miroir. D'ailleurs rien ne relie clairement le photon incident au photon réfléchi.

Bien sûr, on est tenté de chercher des explications à ces constats mais jusqu'à présent aucune des interprétations de la mécanique quantique n'a amené d'éléments concrets qui permettent d'aller plus loin que la théorie de base et notre démarche évite les questions sans réponse.

(1) Dirac, Les Principes De La Mécanique Quantique

(2) Heisenberg, Les principes physiques de la théorie des quanta

(3) Xavier Oriols et Jordi Mompart, Applied Bohmian Mechanics: From Nanoscale Systems to Cosmology